par Alain Souloumiac, le vendredi 18 décembre 2009

Trois objectifs ont formé l'enjeu du sommet de Copenhague:
· la réduction des gaz à effet de serre
· le développement des énergies renouvelables
· la protection du patrimoine écologique de l'humanité.

Plus que les chiffrages, qui peuvent toujours être améliorés, plus que les promesses, dont on connaît la relativité, c'est de la qualité du système international et de l'efficacité des moyens mis en oeuvre par chacun des Etats concernés que dépendra le succès ultime du sommet.


L'Union Européenne (UE) a déjà défini avec précision quelles étaient les exigences globales. La question essentielle est celle de leur implémentation et de leur diffusion.


Les exigences sont fixées


Arrêté par le Conseil européen des 11 et 12 décembre 2008 et le Parlement européen le 17 décembre, le "paquet climat et énergie" vise une réduction des émissions de CO2 à moins 20% d'ici 2020 base 2005. Des mesures sont prévues pour éviter le risque de "fuite de carbone", c'est-à-dire de délocalisation des usines, des emplois et des émissions de CO2 vers les pays tiers.

L'objectif de porter la part des énergies renouvelables dans la consommation totale des Européens à 20% d'ici 2020 a été décliné sous forme d'objectifs nationaux contraignants. La Commission a notamment arrêté son objectif de 10% de biocarburants dans les transports d'ici 2020 en introduisant dans la directive concernée des mesures appropriées pour que cet objectif n'ait pas de conséquences globalement négatives sur l'environnement, les forêts et la faim dans le monde. Des mesures ont été prises pour favoriser le piégeage et le stockage du CO2. D'autres actions législatives sont en cours en matière d'efficacité énergétique, notamment dans les domaines du bâtiment et des produits de grande consommation.

Les principales directives, vecteurs de la mise en oeuvre de cette politique, ont été publiées au Journal Officiel.


Ce qui importe, c'est de faire vite, et bien


La question qui se pose aujourd'hui est celle de la mise en oeuvre effective de ces objectifs au sein des Etats membres - voir de leur dépassement comme le prévoient aujourd'hui les dirigeants de l'UE, et, surtout, de leur diffusion auprès des Etats tiers.

Les Etats Membres, qui disposent généralement de 18 mois pour transposer les directives, ont pris l'habitude de livrer près de 10% des mesures nationales hors délais. Sommés par la Commission de respecter les règles communautaires, ils sous-traitent en urgence la rédaction de lois formelles à des cabinets juridiques. Ce type de transposition a minima se prête mal à l'implémentation des directives innovantes du paquet climatique.

S'ajoutent à ces retards, d'une part les mesures nationales non conformes, qui sont encore plus nombreuses. Le nombre de directives actuellement en infraction est de 1271, soit, pour chaque Etat Membre, un taux moyen de non conformité de 31% par rapport aux 150 directives produites annuellement pour le marché intérieur. D'autre part, rares sont les directives bien implémentées. La Commission européenne estime à 150 milliards d'Euros par an le déficit de croissance lié à la mauvaise implémentation de la législation par les Etats Membres.

Pourtant, ce chiffre ne rend pas compte de tous les dégâts résultant de la mauvaise implémentation. Appliqués à l'environnement pour les décennies qui viennent, c'est en centaines de milliards d'Euros que se calculeront les catastrophes écologiques et humanitaires. Selon le Forum humanitaire mondial, 300 000 personnes meurent déjà chaque année du fait du réchauffement climatique et 325 millions sont durement affectées.

La Commission européenne a présenté le 17 décembre 2009 son rapport annuel sur le contrôle de l'application du droit communautaire (rapport COM (2009) 675/3). Il souligne "l'étendue du problème de la transposition tardive des directives dans le droit national et propose d'engager un rapport interinstitutionnel sur les causes des retards de transposition et les moyens envisageables pour les réduire .... Les secteurs qui continuent de faire le plus grand nombre de plaintes et d'infractions sont l'environnement, le marché intérieur ...".

L'Union européenne a mis en oeuvre avec la politique de voisinage et la politique d'association avec les autres régions économiques du monde (EUROMED, ASEAN, MERCOSUR...) une politique positive d'exportation de l'acquis communautaire. Les pays tiers sont fortement demandeurs. Mais cette politique est extrêmement lente en raison des coûts considérables qu'elle engendre. On estime que l'élargissement, dont la part principale était la transposition de l'acquis communautaire, a coûté plus de 55 milliards d'Euros à l'UE.


C'est la compétence, la traçabilité et le contrôle qui garantissent la qualité


Les experts européens travaillent sur la transposition assistée par ordinateur depuis 1993. La première version du logiciel présentée au public a été applaudie par l'aréopage réuni le 11 décembre 2008 aux Journées Informatiques de l'Union Européenne. Il présente trois avantages déterminant du point de vue du point de vue de la transposition et de la dissémination : il réduit sensiblement les temps et les coûts de la transposition ; il assure sa conformité grâce à des intégrateurs intégrés ; il développe l'effectivité de l'implémentation en intégrant dans le processus administratif le principe des normes ISO 9000.

Le plan d'action intitulé Contrôle global du changement climatique a été soumis au Conseil des ministres de l'environnement réuni à Bruxelles le 23 novembre 2009. Les principaux ministres européens ont accueilli le plan avec un grand intérêt. Il apporte en effet une contribution importante à la grande question qui se posait à la conférence des Nations unies de Copenhague : comment assurer le contrôle de la mise en oeuvre et de la diffusion des mesures appropriées ?

Le plan Contrôle global du changement climatique prévoit trois phases :

1. Une phase transposition grâce à des ateliers de formation réunissant les transposeurs des 27 Etats membres en vue de préparer, sous la direction des meilleurs experts européens, les mesures nationales de transposition des directives du paquet climat et énergie. Les premiers projets pour chaque Etat Membre seront produits durant les 5 jours prévus pour chaque atelier grâce au logiciel de transposition-assistée par ordinateur. Ils seront ensuite soumis dans chaque Etat membre à la discussion des parties prenantes, dans le respect des normes participatives recommandées par l'UE. Un réseau social numérique sera mis en place, dès janvier 2010, entre tous les transposeurs de sorte à permettre à chacun d'avoir accès aux meilleures pratiques de tous. En juin 2010, un processus de certification des projets de législation transposée assurera la clôture de la phase 1.

2. En phase 2, le plan prévoit de nouveaux ateliers pour engager la phase d'implémentation qualité. Grâce au plan annuel do check act un processus d'amélioration qualité sera conduit par chaque autorité d'implémentation sous le contrôle du certificateur prévu par le protocole de transposition assistée jusqu'à l'atteinte des objectifs fixés / révisés par les exigences globales.

3. La phase 3 est consacrée à l'organisation d'un jumelage entre chaque Etat Membre et, au moins un pays tiers, sélectionné durant la période précédente. Les pays tiers bénéficieront grâce au logiciel de l'exemple de toutes les législations transposées par les Etats membres, des standards applicatifs et des plans annuels d'implémentation qualité. La formation sera mise en oeuvre dans chaque pays sélectionné grâce à l'appui de l'Etat Membre responsable. Le processus sera étendu ensuite à tous les autres pays tiers qui en feront la demande.

Ainsi, chacun disposera du miroir renvoyant la mesure de sa responsabilité

Grâce à l'automatisation de la transposition des dispositions verbatim de la directive, le logiciel de transposition assistée permet aux Etats membres d'assurer une transposition rapide des directives, tout en garantissant la conformité totale de mesures nationales et en concentrant l'action sur les dispositions décisives. La diffusion de ces nouvelles méthodes a été jusqu'à présent freinée par la réticence de certaines autorités chargée de la transposition devant les indicateurs de contrôle de conformité et les procédures de certification que comporte l'assurance qualité.

L'auto certification des transpositions, souhaitée depuis longtemps par la Commission, prend aujourd'hui tout son sens. Le Conseil des ministres européens ayant été saisi le 23 novembre 2009, la Présidence de l'Union européenne ayant fait du programme "Mieux légiférer" sa priorité, ces réticences devraient maintenant se dissiper, face aux enjeux de l'ultimatum climatique.



Alain Souloumiac est expert législatif européen

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