par Patrick Martin-Genier, le samedi 14 avril 2012

Jean Léonetti est un ministre des affaires européennes…europhile. Quoi de plus normal me direz-vous ? Pourtant cela n'est pas évident. Il fut des ministres des affaires européennes-et encore récemment-dont la fibre européenne n'apparaissait pas avec évidence, c'est le moins que l'on puisse dire. Certains n'ont d'ailleurs eu d'autre ambition que de quitter ce ministère pour prendre un poste gouvernemental considéré comme plus gratifiant…


L'Europe : une solution à la crise

 

Fort de ses convictions européennes, jean Léonetti vient donc de rédiger une profession de fois européenne en rédigeant une tribune dans Nice-Matin le 12 avril dernier. Le ministre tente de convaincre un « ami eurosceptique », celui que l'on peut croiser tous les jours dans la rue, que l'Europe vaut bien que l'on se dépense pour elle. « L'Europe fait partie pour moi des solutions à la crise que nous traversons » souligne le ministre alors que pour les eurosceptiques, tous les maux sont issus de l'Europe. D'ailleurs, cela n'a-t-il pas été le cas pendant des années, et encore maintenant, le credo de certains responsables politiques qui, lorsque les choses ne vont pas, incriminent systématiquement les institutions européennes.  « C'est de la faute à Bruxelles »  entend-on souvent….Dans cette tribune, le ministre défend également avec force l'euro en estimant que « pendant dix ans, l'euro est restée une monnaie forte et stable qui nous a mis à l'abri d'une inflation galopante ». Pour M.Léonetti «  la crise que nous traversons n'est pas la crise de l'euro mais une crise des dettes excessives accumulées pendant des décennies ». Enfin, référence est faite aux valeurs de démocratie et de liberté.

 

Il faut rendre hommage à ce message proeuropéen du ministre au moment où l'Europe est un peu malmenée pendant cette campagne présidentielle et alors que certains de nos amis européens regardent avec inquiétude la perspective d'une alternance politique en France…

 

Des frontières claire et stables

 

Jean Léonetti en profite pour dire une vérité qui est parfois difficile à entendre : la question des frontières de l'Europe qui doivent être claires et stables. »L'Europe n'a pas vocation à s'élargir sans fin comme le souhaitent certains » assène-t-il. En effet, cette problématique existe depuis aussi longtemps que depuis que l'Europe elle-même existe. Il y a ceux, notamment la Grande-Bretagne, qui sont pour une Europe sans cesse plus large et qui privilégient une seule zone de libre-échange sans grande consistance politique. On l'a bien vu lors du premier discours européen de David Cameron, Premier ministre britannique, en Turquie. Ce dernier avait, fustigé sans égard pour la France, le général de Gaulle qui s'était opposé à l'entrée de la Grande-Bretagne dans l'Europe, pour en conclure que si certains pays s'opposaient à l'entrée de la Turquie au sein de l'Union européenne, celle-ci l'intégrerait évidemment un jour. Le Premier ministre britannique défendait non pas l'intérêt européen, mais l'intérêt commercial et stratégique britannique. Il s'agit d'une constante de la stratégie européenne de la Grande-Bretagne depuis cinquante ans. Il y a enfin les pays qui, plutôt que la dilution de l'Europe, souhaite son approfondissement dans un premier temps puis, dans un second temps, son élargissement si celui-ci a un sens politique, c'est-à-dire que l'impétrant doit s'engager à ne pas entraver le processus de l'intégration politique de l'Europe, voire y contribuer activement.

 

Les déboires rencontrés au cours de ces dernières années avec la Pologne et la République tchèque doivent aujourd'hui rendre les gouvernements prudents. Si l'Europe doit avoir une ambition politique, notamment en matière de politique étrangère, elle ne doit pas renoncer à des avancées politiques majeures afin de renforcer sa crédibilité sur la scène internationale…

 

Un meilleur contrôle des flux migratoires

 

Enfin, Jean Léonetti estime nécessaire « un meilleur contrôle des flux migratoires ». Il s'agit là en effet d'un des principaux défis de l'Europe dans les années qui viennent. Sur ce point, un meilleur contrôle des flux migratoires doit aller de pair avec des programmes d'aide aux pays qui en ont besoin, notamment la coopération décentralisée, afin d'aider les populations des Etats les plus pauvres à vivre sur place et dans des conditions décentes. Cela doit se faire d'ailleurs du niveau européen au niveau local. Les communes qui mettent en place, lorsqu'elles en ont les moyens, un programme de coopération décentralisée de façon concrète avec des villages du tiers-monde, peuvent voir le fruit de leur action lorsqu'il s'agit d'installer un système d'irrigation, d'économie solidaire ou d'éducation.

 

Il est par ailleurs indispensable d'aider les pays frontières comme l'Italie à gérer avec dignité les flux migratoires massifs qui arrivent d'Afrique.

 

Bref, les défis sont encore immenses et la grande aventure européenne continuera après l'élection présidentielle. Souhaitons que Jean Léonetti, qu'il reste ou non ministre des affaires européennes, y contribue pleinement.

 


Patrick Martin-Genier est Maître de conférence à l'Institut d'études politiques de Paris, vice-président et éditorialiste de Fenêtre sur l'Europe.

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