par Xavier Grosclaude, le lundi 22 mai 2006


Alors que l'Estonie vient de ratifier le Traite Constitutionnel, l‘Europe se fait rare en France et les partisans du "non", très prolixes durant la campagne référendaire, sont désormais peu diserts sur les modalités du fameux "plan de relance" ; Plan qui, pour rappel, devait nous permettre de créer une "puissante dynamique" favorable à une renégociation globale du Traité…vous connaissez la suite.

Quoiqu'il en soit, il reste un vote que l‘on aurait tort d'ignorer car il constitue un vote d'évitement qui sur le fond, excepté pour une infime minorité, ne constitue pas un vote anti-européen d'ailleurs, si globalement la relation des français à l'Europe s'est un peu dégradée rien n'indique que le sentiment d'appartenance européenne ait, quant à lui, régressé.

En réalité, les 55% de français qui ont voté "non" ont souhaité majoritairement éviter une confrontation immédiate avec la réalité du nouveau monde issu du capitalisme financier. En soi, ce choix qui traduit le profond désarroi d'une partie de nos concitoyens face aux mutations sociétales et économiques en cours est respectable mais la vérité oblige à dire qu'il n‘est porteur d'aucun avenir et le pire, du point de vue politique, c‘est que l'électorat noniste dans sa très grande majorité en a parfaitement conscience. Reste la question fondamentale que faire pour relancer la machine ?

D'aucuns préconisent de réinvestir le champ du social, partant du principe que l‘Europe fait peur aux citoyens et qu'il existe au sein de la population un besoin de protection. Cette approche est séduisante mais obéit à des préoccupations de politique intérieure strictement franco-françaises sans grand écho en dehors de nos frontières. Or, faut-il le rappeler l'Union européenne compte désormais 25 pays membres.

Aujourd'hui, les véritables enjeux portent sur l‘émergence d'une "Europe Mondiale" capable d'exister sur la scène internationale et la définition de politiques structurantes dans les domaines énergétiques, technologiques et militaires. Ignorer cette réalité c'est se réfugier dans les délices de paradis artificiels aux horizons très incertains.

Face à ces défis, le rôle de la France n'est pas de pratiquer la politique de l‘autruche mais de travailler à la recherche d'un nouveau mode de gouvernance pour l'Union et aux modalités d'une meilleure implication des citoyens dans la construction de leur futur. Aussi, revient-il à nos gouvernants d'ouvrir une nouvelle voie entre le Traité de Nice, qui, on ne le répétera jamais assez, est un mauvais traité et le Traité établissant une Constitution pour l'Europe.

Pour être efficace, ce nouveau traité devra être clair dans ses objectifs, concis dans sa rédaction et synthétique dans sa forme pour que le plus grand nombre puisse se l'approprier. Ces trois conditions sont aussi nécessaires pour permettre une communication efficace sur l'Europe. Lors de la dernière campagne référendaire le principal ennemi des partisans du Traité a été l'ignorance des Français, ignorance partagée par l'ensemble des citoyens européens comme le souligne le dernier rapport d'Eurobaromètre intitulé "les citoyens européens et l‘avenir de l'Europe".

Cette méconnaissance qui permet tous les discours les plus fantasmagoriques de la terre évite en réalité à leurs auteurs de traiter les vraies questions de fond. Sur ce point précis, la prochaine élection présidentielle devra renouveler l'offre politique en matière européenne.

Au moment où l'histoire du monde s'accélère de façon formidable, il semble difficile de s'en tenir aux slogans et aux petites phrases assassines de la dernière campagne référendaire. Les français, qu'ils aient voté "oui" ou " non" sont d'ores et déjà demandeurs d'une nouvelle doctrine européenne capable de les projeter collectivement vers l‘avant. Ne pas répondre à leur attente serait politiquement suicidaire et très peu respectueux de nos partenaires européens, qui jusqu'à maintenant ont fait preuve d'une extrême patience à notre égard. Aussi, sauf erreur, la balle est dans notre camp du moins pour l'instant…


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