A trop se regarder, l'Europe a souvent multiplié les déconvenues, compliqué son existence, embrouillé ses citoyens. A se tourner vers le monde elle gagnerait sa force, la fierté d'appartenance et son unité.
Le Conseil européen de Lisbonne met un terme à la crise ouverte par le rejet de la Constitution européenne. L'Union a réglé une partie de ses problèmes internes. Elle doit maintenant se tourner davantage vers l'extérieur.
Contrairement au sentiment commun, l'Europe compte de plus en plus dans le concert international :
- Son PIB représentera à la fin de l'année, 32% de la richesse mondiale (26 pour les USA, 8 pour le Japon, 3 pour la Chine et 2 pour la Russie).
- Beaucoup veulent y adhérer.
- Tout le monde lui tend une main intéressée : elle distribue à son voisinage et pour l'aide humanitaire près de 6 milliards par an.
- Elle est sollicitée de toutes parts : ses Etats membres sont impliqués dans 33 opérations extérieures, dont 12 relèvent de la politique européenne (17 de l'ONU et 4 de l'OTAN) ; elle aura tenu, en 2007, 84 réunions, de niveau au moins ministériel, avec les pays tiers, soit une tous les 3 jours ouvrables ! Personne ne fait mieux.
- Elle n'a pas à rougir de son niveau de vie, ni bien sûr des valeurs de Liberté, de Démocratie et de Paix qu'elle incarne et projette, comme ses normes, sur tous les continents.
Au seuil de l'Union politique, l'Europe ne doit pas se replier sur elle-même mais se projeter dans le monde. Son unité politique en sera facilitée. Encore faut-il poser les bonnes questions qui sont désormais devant nous. Elles sont vraiment de nature politique :
- Relever le défi de l'insécurité, c'est bâtir une défense commune et accepter d'y consacrer les moyens nécessaires ; c'est aussi rapprocher nos justices et nos polices.
- Relever le défi de la croissance, c'est-à-dire de la prospérité, c'est se battre dans la compétition mondiale, au niveau européen, avec les armes des Etats-continents du moment : réciprocité, négociations, comparaisons. Elle est le continent de l'ouverture ; elle doit aussi forcer les autres à s'ouvrir.
- Relever le défi social et environnemental, c'est promouvoir notre modèle, sans scrupules, pour que le maximum d'individus profite des mêmes conditions de vie et de liberté que les Européens. Si tout n'est pas parfait chez nous, c'est souvent bien pire chez les autres !
L'Europe est à la dimension du monde d'aujourd'hui et dispose de tous les atouts pour y réussir. Il ne lui manque que la volonté politique. Ne doutons pas que la présidence française s'y consacre !
Jean-Dominique Giuliani (http://www.jd-giuliani.org) est président de la Fondation Robert Schuman (http://www.robert-schuman.eu)