Le fait même que la présidence de l'Union européenne soit considérée en France comme un événement est une nouveauté qu'il faut saluer. En la matière, d'habitude, l'indifférence et la méconnaissance côtoient le mépris et l'ignorance pour alimenter le scepticisme.
Nicolas Sarkozy a voulu beaucoup investir et communiquer sur ces quelques mois de responsabilités à la tête du Conseil européen. Tant mieux !
Pour autant la difficulté de sa tâche ne doit pas être sous-estimée.
Les dossiers déjà sur la table du Conseil des ministres de l'Union sont complexes. Il faudra beaucoup d'engagement et de finesse pour les faire aboutir.
Mais le refus irlandais de ratifier le Traité de Lisbonne place aussi la relance politique au premier rang des priorités. Dans l'interminable débat sur les institutions, cet ultime obstacle doit être surmonté avec patience mais aussi avec fermeté.
L'intégration du continent est approuvée par les peuples comme l'une des avancées majeures du siècle précédent. Les politiques de l'Union servent plutôt de catalyseur aux angoisses et cristallisent les mécontentements qui ne peuvent s'exprimer ailleurs. Pour les surmonter, tout en prenant en compte ce qu'ils expriment, c'est de "gestes hardis", d'un vrai mouvement politique, d'une sortie vers le haut, dont nous avons besoin.
L'approche "plus politique" voulue par la France le permet en toute transparence. Elle implique des actions concrètes, mais aussi des gestes qui engagent l'avenir vers une unification plus achevée dans les domaines où les Etats n'ont manifestement plus la capacité d'agir seuls efficacement.
Le vrai sens de la présidence française c'est donc de donner un style, mais aussi un contenu très politique aux orientations et aux décisions de l'Union.
Il est plus que temps. Il n'est pas certain que tous les Etats membres en aient envie. Il appartiendra à ceux qui le veulent d'avancer sans se laisser freiner par le clan des "timorés de l'Europe", dont la France semble être sortie.
Le jeu en vaut la chandelle avant les élections européennes de juin 2009 qui pourraient servir de ratification populaire à un nouvel élan, pour peu qu'elles soient "politisées" comme il se doit. Elles doivent être réellement européennes, c'est-à-dire transnationales, avec des candidats de toutes nationalités sur les listes nationales, des programmes communs aux grandes familles politiques des pays européens et même des candidats communs aux principales fonctions européennes, dont on connaisse le nom et les idées à l'avance.
La politique, c'est le début de la démocratie. Les élections c'est la preuve de la démocratie. Préparer le bien commun dans la transparence et le contrôle populaire, c'est le rôle de la démocratie. Elle est possible en Europe. Cela reste à démontrer.
Editorial paru sur le site: http://www.jd-giuliani.eu
Jean-Dominique Giuliani est président de la Fondation Schuman
http://www.robert-schuman.eu