par Maxime Lefebvre pour la Fondation Schuman, le lundi 09 juillet 2012

Avant de relancer le projet d'« Europe puissance », l'Union européenne doit d'abord surmonter la
crise de la zone euro, qui la conduit actuellement à l'introspection[1]. Si elle en sort plus unie et
plus solidaire, l'Union européenne pourrait aussi se donner les moyens de renforcer sa présence
sur la scène internationale, d'accroître son autonomie stratégique, de peser davantage sur mondia- lisation. Soyons clair : l'Union européenne ne sera sans doute jamais une puissance westphalienne classique, avec une politique étrangère et une politique de défense totalement unifiées. Une bonne collaboration entre les Etats membres (en particulier les plus grands d'entre eux, ceux qui ont encore un statut de puissances sur la scène internationale) et les autorités bruxelloises, appuyée sur des outils mutualisés plus solides et plus étoffés, est la condition d'une affirmation de « l'Europe puissance ». Il ne faut pas non plus éluder la question des limites de ce projet : si l'Union continuait à s'élargir, la relance de l'Europe politique à partir d'une zone euro plus intégrée pourrait se poser.


INTRODUCTION
L'Union européenne est actuellement engluée dans la crise de la zone euro. Pour l'avenir du projet européen, le règlement de cette crise -par le mélange de disciplines communes, de solidarité et d'une meilleure coordination des politiques économiques au service de la crois- sance- est évidemment un préalable. Cela n'empêche pas de porter le regard au-delà des difficultés actuelles et de réfléchir à la manière dont les Européens, plus unis et plus solidaires les uns des autres, pourraient s'organiser pour peser dans un monde où leur influence relative se réduit.
Or les promesses que recélait le traité de Lis- bonne, avec une présidence stable du Conseil européen et du Conseil des ministres des Af- faires étrangères, et la création d'un service européen pour l'action extérieure, ne semblent guère porter leurs fruits, en tout cas pour le moment. L'Union européenne n'a pas joué les premiers rôles dans le « printemps arabe », et n'a lancé aucune nouvelle opération militaire de la politique de sécurité et de défense commune (PSDC) depuis 2008.
Faut-il en conclure que le projet d'une « Europe puissance », compliqué par une Europe de plus en plus nombreuse (28 Etats membres après l'adhésion de la Croatie le 1er juillet 1013), doit
être rangé au placard avec tous les rêves ina- boutis des philosophes ou des visionnaires ? En posant la question à l'échelle du temps long, il y a des raisons de nuancer ce pessimisme. Il a fallu 20 ans pour que la construction euro- péenne, lancée par la déclaration Schuman en 1950 sur l'économie, prenne une forme poli- tique par une coopération au niveau de la poli- tique étrangère, et encore 30 ans pour qu'elle se donne une dimension de sécurité et de défense. La nature même du projet européen est un pro- cessus lent et progressif, alternant les phases d'avancées et de stagnation.
Plutôt que de se lamenter sur l'état actuel de l'Union européenne, réfléchissons à la manière dont les choses pourraient progresser, à travers quelques points de fond et de méthode.
1) Poser le débat de « l'Europe puissance »
avec une exigence de réalisme
L'Union européenne n'est pas, et ne sera peut- être jamais, un Etat fédéral, disposant comme l'Allemagne, les Etats-Unis ou la Suisse de la compétence des compétences. En ce sens, elle ne peut pas être non plus une puissance « westphalienne », fondée sur un pouvoir poli- tique incarnant une unité de commandement et maniant les instruments de souveraineté de

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Maxime Lefebvre est Directeur des relations internationales à l'ENA, et professeur à Sciences Po.

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